Par Alain Fraval. OPIE-Insectes. « Les Épingles entomologiques - En épingle en 2015 : Août
« Publiés dans Current Biology, les travaux signés Masaru Hojo, Naomi Pierce et Kazuki Tsuji (université de Kobé, Japon) précisent la relation curieuse entre un papillon et une fourmi. »
« Les chenilles de Lycénidés sont – pour la moitié des espèces de cette famille - associées à des fourmis auxquelles elles procurent du pseudonectar en échange de leur protection, selon des modalités variées. Les espèces myrmécophiles possèdent plusieurs glandes exocrines dont les sécrétions servent à assurer et à réguler leurs relations avec les fourmis. Il s’agit notamment de la glande de Newcomer sur le 7e tergite abdominal – d’où sourd un pseudonectar nutritif – et des organes en clou, alias organes éversibles latéraux, sur le 8e segment, qui servent à attirer ou alerter les fourmis en compagnie desquelles elles vivent.
Narathura japonica (Thécliné), originaire du Japon et répandu en Extrême-Orient, se développe sur les feuilles des chênes, notamment. On pensait que les jeunes chenilles étaient associées dans une relation à bénéfice mutuel – nourriture contre protection – à la fourmi Pristomyrmex punctatus (Hym. Myrmyciné). Or il est apparu que les fourmis ayant consommé le pseudonectar, au lieu de vaquer parmi leurs congénères, restaient contre la chenille, comme engourdies. »
« Ce comportement a été reproduit au laboratoire où l’on a observé en plus que les fourmis consommatrices réagissaient à l’éversion des organes en clou (signe d'alerte) en s’agitant et en agressant tout ennemi potentiel. À l’analyse, leur cerveau montrait un déficit en dopamine. Traitées avec de la réserpine (inhibiteur de la dopamine chez la drosophile), les fourmis ont vu leurs mouvements ralentis. »
« La chenille manipule le comportement des fourmis en sa faveur, en les maintenant auprès d’elle, comme des gardes du corps. Il reste à identifier, dans le pseudonectar fourni par la glande de Newcomer, la ou les substances qui affectent le métabolisme de la dopamine chez la fourmi. »
D’après, entre autres, « Caterpillar chemical turns ants into bodyguards », par Bob Yirka. Lu le 3 août à //phys.org/news/
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À (re)lire : Le Chlorion et autres manipulateurs, par Alain Fraval. Insectes n° 163 (2011-4).