Avec ou sans floraison, les néonicotinoïdes représentent des risques pour les pollinisateurs | EntomoNews | Scoop.it
Contrairement aux arguments avancés par les syndicats agricoles, l’usage des insecticides systémiques a un impact sur la biodiversité, comme l’attestent de nombreux travaux scientifiques.

 

Par Stéphane Foucart, 12.08.2020 (abonnés)

 

"Après les betteraviers, les maïsiculteurs veulent à leur tour pouvoir déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes. Vendredi 7 août, au lendemain du communiqué du ministère de l’agriculture annonçant la réintroduction jusqu’en 2023, sur la betterave, de cette classe de pesticides bannie depuis 2018, le syndicat du maïs a réclamé du gouvernement des mesures semblables.

Le succès obtenu par les betteraviers repose largement sur un argument de bon sens apparent : la betterave à sucre étant récoltée avant floraison, elle ne constitue pas une culture attractive pour les abeilles et les pollinisateurs. Le traitement de la betterave par enrobage de semences serait donc sans risque pour ces insectes. Mis en circulation par les milieux de l’agro-industrie et repris par le ministère de l’agriculture dans sa communication, cet argument a été largement repris sur les réseaux sociaux par des élus et des responsables politiques.

 

Selon un schéma désormais récurrent, il a également été adoubé par des personnalités scientifiques s’exprimant généralement hors de leur champ de compétence. « Si l’insecticide a été interdit pour de mauvaises raisons, ce serait une faute politique que de ne pas le réautoriser, a par exemple déclaré, le 8 août, sur Twitter, le médecin et universitaire Jean-Loup Salzmann, ancien président de la Conférence des présidents d’université (CPU). En enrobage de semence de plante ne fleurissant pas, il n’y a aucun danger pour les butineurs. La politique doit s’appuyer sur la science. »

Un risque élevé pour les abeilles

De nombreux travaux scientifiques ont pourtant montré que même en l’absence de floraison des cultures traitées, les néonicotinoïdes représentent un risque élevé pour les abeilles, les pollinisateurs et les insectes auxiliaires des cultures. Les gouttelettes d’eau (ou « eau de guttation ») exsudées par les plantes, et auxquelles des pollinisateurs peuvent venir s’abreuver, sont par exemple une voie d’exposition. Celle-ci a été mise en évidence en 2009 par des chercheurs italiens, et publiée par le Journal of Economic Entomology.

 

Autre danger : les semoirs pneumatiques, qui injectent les semences enrobées dans les sols, peuvent, par effet d’abrasion sur les graines, générer des nuages de poussières. Aux alentours des parcelles traitées – sur la végétation, les sols ou encore les eaux de surface –, ces poussières déposent de l’insecticide à des concentrations présentant un risque pour certains insectes non ciblés."

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[Image] Guttation drops on corn leaves in the Þeld. (Online Þgure in color.) | Download Scientific Diagram
https://www.researchgate.net/figure/Guttation-drops-on-corn-leaves-in-the-THeld-Online-THgure-in-color_fig1_38064476